Mes débuts dans cette ville

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Je regardais par la fenêtre la fumée des cheminées sur le toit des maisons. Je toussais un instant, maudissant cette pluie dégueulasse qui tombait depuis déjà plusieurs jours.

Ce rendez-vous au Twenty too bar m'avait été arrangé par mon frère, qui appartenait déjà au Spectre depuis quelques temps. J'peux pas dire que ça m'impressionait de rencontrer le caïd de cette petite bande parce que j'en avais vu d'autres dans ma ville d'origine, mais c'est vrai qu'ici, je faisais mes débuts, alors c'était une fleur qu'on m'faisais en m'prenant dans cette alliance. J'serais mon couteau dans la poche de ma veste, comme c'était la seule arme qu'j'avais pu dégoter à ma sortie de prison.
J'ai bien poireauté un quart d'heure avec cette bouteille de mauvaise bière que je peinais à finir.

Et puis, ces trois gars sont rentrés dans le bar, genre bas du front, musclés comme des taureaux et fringués comme des gitans. J'les ai vus regarder un peu partout, à dévisager tous les clients au milieu des fumées de cigarettes. J'crois qu'tout le monde les a regardé avec une certaine méfiance, mais c'est vers moi qu'ces malabars ont zieuté et faut dire que j'me suis senti un peu seul l'espace d'une seconde.

Le plus âgé, qui portait un chapeau un peu petit pour sa tête mais trois fois trop large pour son cerveau, s'est approché de moi et s'est planté devant ma table.

"Toi, là, tu t'lèves et tu nous suis!" qu'y m dit, comme si c'était une évidence qu'j'allais être de son avis.
Je crois que j'ai dégluti un peu maladroitement avant d'lui répondre :
"Désolé, m'sieu, j'attends quelqu'un et j'crois pas qu'on s'connaisse!
-T'as raison, on s'connait pas et il s'pourrait qu'ça soit l'problème. Maintenant, c'est moi ton rendez-vous, alors tu poses ta bouteille, tu remets ta petite veste et tu t'ramènes!", qu'il me gueule, toujours aussi aimable.

C'est là qu'j'ai calculé qu'ça pouvait être un test et qu'ça pouvait être Boris le Hachoir qui m'envoyait ses gorilles pour tester mes réactions. Alors j'me suis levé, j'ai remis mon trench coat encore humide et j'ai fixé le bourrin dans les yeux en même temps qu'j'alignais les 75 cents que coûtait ma petite bière.

J'ai suivi les trois gonzes jusqu'à leur caisse, une ford T comme possèdent tous les citoyens honorables de cette bonne petite ville. Celui des trois qu'était le moins garutte a pris le volant tandis qu'le vieux continuait à jouer les caïds en m'disant : "T'as pas intérêt à joueur au malin, petit. Tu restes bien sage à l'arrière et on sera gentil"
"Cause toujours!" que j'me suis dit serant dans ma poche le pauvre canif qui serait ma seule défense si on en venait aux mains.
Il m'ont conduit ainsi à travers les rues droites de la ville pendant près d'une demi-heure, faisant pleins de détours exprès pour que j'puisse pas me repérer.

Et puis on est arrivé dans une vieille zone industrielle, à côté des docks. J'ai vu que le gars à côté de moi a fouillé dans sa poche intérieure et il m'a sorti un flingue qu'il m'a agité sous le nez en m'grinçant aux oreilles : "allez sage, le clébard, tu vas descendre de la caisse tranquillement et t'attends qu'on t'dise quoi faire pour bouger. Au moindre signe de désobéissance, tu finiras au fond du port, avec trop de plomb dans les miches pour pouvoir remonter."

Il m'ont sorti de la voiture et ils m'ont fait avancer vers un vieux hangard où y avait une vieille peinture publicitaire pour la cire à chaussure Henard. Quand ils ont entrouvert la grande porte du hangard pour m'y faire entrer, j'ai juste vu qu'il fesait sombre comme en enfer à l'intérieur et il m'ont obligé d'aller dans la direction de la seule lampe allumée du bâtiment. J'essayais de réfléchir au moyen d'me sortir de ce guêpier si ça tournait mal à mesure qu'on avançait, mais j'sentais mes jambes flagoler et tout ça m'inspirait rien de bon.

Il m'ont fait m'tenir dans la lumière d'manière à c'que j'm'habitue pas à l'obscurité, je suppose. Y'avait une chaise en bois sur laquelle ils m'ont assis, les trois gorilles m'entourant comme si j'étais le saint père dans sa papomobile.
Alors, j'ai entendu une voix grave, avec une espèce d'accent russe qui résonna dans le hangard comme si elle venait d'une passerrelle un peu plus haut : "Alors il est comment?"
- Doux comme un agneau, chef, doux comme un agneau! répondit le vieux qui m'avait amené là.
J
'entendis des voix chuchoter dans le noir, et j'sentis que "doux comme un agneau" était pas vraiment un compliment pour les lascars à qui j'avais affaire. J'savais pas trop comment réagir, s'il fallait que j'prouve que j'avais des couilles ou qu'j'étais respectueux d'la hyérarchie.

Il s'est passé quelques secondes avant qu'la voix du ruskoff résonne à nouveau et il cracha "bon, ben si c'est un agneau, vous allez m'le tondre et on en parle plus! "

Sur les quatre gars qu'étaient en bas, j'crois qu'y a que moi que ça a pas fait marrer et j'crois qu'j'ai plus eu d'autre choix, alors j'ai réagi. En une seconde, j'me suis relevé, tête en avant, vers le chauffeur qui s'avançait sur moi pour m'attraper. Ca lui a mis le pif en sang, juste le temps pour moi d'attraper la chaise sur laquelle ils m'avaient posé pour l'écraser sur la gueule du vieux. C'est au moment où il s'est affalé sous le coup qu'une détonation a retentie et qu'm'on genou a explosé. Et ouais, le malabar et son flingue, j'les avais un peu trop facilement oubliés derrière moi et il m'ont pas laissé une chance. J'ai gueulé comme un porc, moitié affalé sur le vieux qu'avait pas l'air de vouloir se réveiller. Le chauffeur était encore en train de tenir son nez à deux mains, son propre sang lui maculant les mains et accessoirement la gueule. Moi, j'avais du mal à rester lucide, incapable de me relever et le genou en sang, la douleur vibrant dans ma jambe comme par pulsations.

Le gars au flingue est entré dans l'étroit périmètre éclairé, menaçant, son flingue tendu vers moi comme un cadeau un peu trop poli. Il avait l'air sacrément furax et j'savais qu'j'avais pas l'avantage avec ma patte folle. J'ai essayé de me redresser mais c'était peine perdue. En retombant par terre, j'ai vu l'ombre du gonze m'engloutir complètement, ses yeux bouffés par la rage comme il voyait ses potes en sale état. Il m'a attrapé au colet et m'a enfoncé son flingue dans la bouche, avec le sourire mauvais du garçon qui va faire un truc salement vilain.

"Alors, l'agneau, on veut pas s'tenir tranquille. T'inquiète pas, garçon, chui l'berger, et tu vas avoir droit à la tonte!"
On aurait dit qu'il fesait durer l'plaisir à m'blablater comme ça. J'lui ai pas laissé cette chance, et serrant dans ma main le couteau qu'ils avaient pas eu la présence d'esprit d'm'enlever, j'lui plantais d'un grand geste juste dans le cou, balançant en même temps mon autre bras pour dégager son flingue de ma gueule. Dans un dernier geste, il pressa sur la détente, shootant par hasard la pauvre lampe de la pièce.

Après la détonation, des bruits de pas sur un escalier métallique se firent entendre, comme les autres hommes de main du parrain devaient être en train d'se radiner.

J'ai fait ni une ni deux et j'me suis aidé de c'qui restait de la chaise pour me relever, clopinant alors en direction de la porte du hangard.
J'arrivais à peine à la porte métallique du hangard, la douleur dans mon genou et la rage de vivre dans les tripes, quand j'senti un flingue se pointer sur mes hanches. Suant à grosses gouttes, saignant méchamment, j'eus juste le temps d'entendre la grosse voix du russe :
"C'est bon, t'es pris!"

Parfait, ah si j'avais autant de tallent!!!

Très beau RP !!!!

Jolie épreuve de style...

il y aura une suite, vous inquiétez pas.

clap-clap-clap

tres beau RP, a lire tes lignes on se met direct dans la peau du perso.
et le style est excellent, ca fait plaisir.

a +, j'arrive bientot parmi vous.

12 mars

Il y avait comme une odeur dans l'air. C'était pas les fumées de cigarettes ni la puanteur accumulée de toutes les haleines de soiffards de cette boîte de country. Non, c'était autre chose.
Dolly Pragton et les Dallas Boys étaient sur scène depuis vingt minutes déjà et les tournées de bières successives avaient surchauffé la salle. Alors qu'elle entonait son tube "O grlorious river", j'allumais une cigarette, plissant mes yeux déjà rougis par le nuage de fumée qui planait sur le club. Sans doute que j'aurais pu picoler avec les autres et reprendre à tue-têtes ces vieux standards country, mais j'étais là pour le travail.
J'attendais le patron du club à qui j'avais fixé rendez-vous et ce rigolo avait le courage de me faire attendre. J'avais ramené cinq de mes gars et il était manifeste que j'en étais pas encore au niveau où ma réputation me précédait. Il allait donc falloir que je fasse comprendre "explicitement" à ce Jim Marshall qu'il travaillait désormais pour moi et que cette offre était non négociable.
Pour l'instant, je profitais d'une petite bouteille de cognac "cadeau de la maison" que la petite serveuse m'avait amené. Je jettais un coup d'oeil à ces gars que j'avais recruté à vil prix quelques jours avant et qui m'accompagnaient maintenant à peu près partout. Ils étaient absorbé par le spectacle, comme la belle Dolly lançait les notes les plus aigus dont elle était capable pour le finish de "My sweet little flower"...
Aux premiers applaudissements du public, je vis Tony, le plus dégourdi de mes gars, entrer en trombe dans le club. Il était sensé surveiller ce qui se passait à l'extérieur et le fait qu'il entre était plutôt mauvais signe. Il prononça tout bas "les flics", mais ce fut suffisamment distinctement pour que je le lise sur ses lèvres.
Je me levais, attrapant d'un geste mon manteau et mon chapeau, prenant la direction de la sortie de secours, talonné quasi directement par mes hommes de main.
Les premiers accords de "You shouldn't have done that" résonnaient dans l'air quand la flicaille rentra en gueulant par l'entrée principale. Au même moment, la porte de la sortie de secours claquait derrière nous sans que personne n'en remarque le bruit.
C'était donc ça l'odeur que j'avais flairé toute la soirée. L'odeur dégueulasse d'un malin qui pensait pouvoir me doubler.
Dommage pour lui!
"O, babe, you shouldn't have done that. O babe, why did you betrayed me?"

encore un beau rp
c cool ca fait vivre le forum

sphinx

13 mars (04h25 du matin)

"C'est drôle comme le sang est difficile à faire partir, tu trouves pas?"
Cimino était assis au bord de la baignoire, il retroussa ses manches déjà maculées de quelques gouttes de sang. Tony et Ricky étaient aussi dans la salle de bain, cachant partiellement la silouhette épaisse de Marshall. Celui-ci était agenouillé dans la baignoire, les mains ligotées derrière le dos. Une grande coulée de sang se dessinait depuis le bas de son visage jusque en bas de son ventre. De nombreuse gouttes salissaient le blanc de la baignoire et ruisselaient jusque dans le fond où le pantalon du patron de la boîte de country faisait éponge.
"Tu vois, Jim, reprit Mickael Cimino, tu permets que je t'appelle Jim ? J'ai tout de suite senti que t'était un gars compréhensif. J't'ai pas dis ça, Tony? J't'ai pas dit que si on lui expliquait bien à Jim, il se rallierait à notre point de vue. Alors c'est agréable de t'expliquer les choses, Jim, parce que je sais que dès maintenant, j'ai affaire à quelqu'un de très attentif."
Marshall émettait un bruit qui aurait pu être un sanglot s'il n'avait pas été parasité par le gargouilli de sang qui lui coulaient du nez et de la bouche. Il ouvrit la bouche pour parler, mais sa phrase s'étouffa dans une glaire de sang et il se remit à sangloter.
Cimino fit un signe à Tony qui lui tendit son manteau d'où il pu extraire son paquet de cigarettes. Dans la salle de bain, le son de la ventilation saturait l'air d'un vrombissement nazillard. Cimino essaya une fois encore d'essuyer sa main droite ensanglantée à la serviette pendue à côté de lui avant d'attraper une cigarette qu'il porta à sa bouche. Il semblait réfléchir en même temps qu'il décomposait lentement ce mouvement, et le descendant d'Irlandais qui perdait son sang dans la baignoire, plongé dans un état de semi-conscience par la douleur, cracha un autre caillot de sang dans le fond de la baignoire, avant de s'affaler totalement.

13 mars (4h40 du matin)

La cigarette accrochée au bout des lèvres, Cimino tenait le pomeau de douche d'une main et le col de Marshall de l'autre. Il lui arrosa la gueule abondamment, nettoyant partiellement le sang qui la couvrait et lui faisant reprendre conscience brutalement.
Les yeux mi-clos de l'irlandais étaient boursouflés par un mélange de douleur, de fatigue et de larmes. En face de lui, il percevait dans le vague le visage du mafieux qui venait de le torturer. N'ayant plus assez de forces pour avoir peur, il déglutit douloureusement et fixa son interlocuteur avec un air inexpressif.
"Bon, Jim, comme je vois que t'es réveillé, reprit Cimino, je vais t'expliquer les derniers petits détails avant de te laisser retourner à tes petites affaires."
Le mafieux ressera son emprise sur le col de Marshall.
"Ton club, à partir de cette nuit, il est à moi. A partir de cette nuit, tu travailles pour moi, et si je te paye un salaire, il faut que tu t'estimes heureux. Des gars à moi vont passer régulièrement dans ton bouge, et si t'aligne pas exactement la somme qu'on a convenue, tu m'obligeras à venir te passer une autre petite visite."
Cimino marqua une pause, enfonçant littéralement le pomeau de douche dans la joue du patron de la boîte, "et si jamais, par le plus grand des hasard, je reçois la visite d'un quelconque agent de la force publique..." il rapprocha sa bouche au niveau de l'oreille de Marshall"... tout le monde dans cette ville se rappelera de toi comme du fait divers le plus salement dégueulasse qu'on ait vu depuis longtemps."
Ces derniers mots pleins de rage résonnèrent quelques secondes dans l'air avant que Cimino n'ajoute : "Capice, l'irlandais?"
Celui-ci hocha péniblement la tête, secoué par un spasme incontrôlable.
L'Italien relacha son emprise et repoussa l'Irlandais au fond de la baignoire, ce qui lui arracha un autre cri de douleur.
Cimino se releva calmement, se lava longuement les mains dans le lavabo avec du savon noir, observa le sang sur les manches de sa chemise blanche, puis remit son manteau.
Ses poings étaient légèrement endoloris à force de cogner. Il replia sa lame de rasoir après l'avoir passée sous l'eau et la rangea en même temps que son briquet.
Ses hommes lui firent la place quand il sortit de la salle de bain, et Tony lui tendit son chapeau. Cimino écrasa sa cigarette sous sa chaussure et quitta l'appartement.
En sortant, il se dit que la nuit n'était pas si chaude, finalement, et il rabattit le col de son manteau. Dans la rue, il regarda un instant la lune, alors qu'un de ses hommes ouvrait pour lui la portière de sa ford, et il plissa les yeux. Perdu dans ses pensées, il sentit un instant comme une espèce de mal de ventre. Et puis la douleur disparut et il s'engouffra dans la voiture.

Slt Cimino...
J'aimes bien tes RP, ils sont prenant!
J'attends vivement la suite